PROCÉDURE PÉNALE : COMPARAISON ENTRE LE MAROC ET LA FRANCE

En matière pénale, certaines règles procédurales au Maroc et en France sont identiques, d’autres sont complètement différentes. Un aperçu comparatif de quelques mesures essentielles peut être utile dans le traitement de certaines affaires pendantes entre les deux États.

procÉdure pÉnale comparaison entre le maroc et la france ,la procédure pénale marocaine, droit pénal comparé, la procédure pénale française

1. Les règles en matière d’enquête :

  • a. L’enquête de flagrance :

Au Maroc et en France : Les règles régissant la situation de flagrance quant à ses critères sont les mêmes dans les deux législations : Est qualifié crime ou délit flagrant le crime ou le délit qui :se commet actuellement ; qui vient de se commettre ; lorsque, dans un temps très voisin de l’action, la personne soupçonnée est poursuivie par la clameur publique, ou est trouvée en possession d’objets, ou présente des traces ou indices, laissant penser qu’elle a participé au crime ou au délit.
(Article 56 du CPP marocain / Article 53 du CPP français).

En France : La durée de l’enquête de flagrance n’est précisée que par le CPP français : « A la suite de la constatation d’un crime ou d’un délit flagrant, l’enquête menée sous le contrôle du procureur de la République dans les conditions prévues par le présent chapitre peut se poursuivre sans discontinuer pendant une durée de huit jours » (Article 53 du CPPfrançais).

Ainsi, à l’expiration du délai de huit (8) jours, sauf prolongation -une seule fois pour la même durée- dictée par la nécessité d’investigations supplémentaires, l’enquête devient préliminaire.La garde à vue (GAV) obéit à des règles différentes, notamment quant à la durée et aux droits du gardé à vue. Partant, que ce soit au Maroc ou en France, le suspect doit recevoir notification de ses droits dès son placement en GAV. La durée de la GAV :

Au Maroc : la durée initiale pour les infractions de droit commun est de 48 heures prolongeable pour une durée supplémentaire de 24 heures (soit une durée maximale de 72h).
En régime dérogatoire, la durée initiale pour les infractions portant atteinte à la sûreté de l’État est de douze 96 heures renouvelable une seule fois ; pour les infractions terroristes, la durée maximale est de 96 heures renouvelable deux fois pour la même durée (soit 12 jours).
(Article 66 du CPP marocain).

En France : La durée initiale pour les infractions de droit commun est de 24 heures renouvelable une seule fois (soit une durée maximale de 48h). La durée maximale pour les infractions relevant du régime dérogatoire prévues à l’article 706-73 du CPP français est de 96 heures (après deux prolongations de 24 heures). Parmi ces infractions, l’on trouve le trafic de stupéfiants, certaines infractions commises en réunion ou en bande organisée, proxénétisme, association de malfaiteurs, etc…

En matière de terrorisme, la durée maximale après prolongations est de 144 heures (soit 6 jours). (Articles 63 et 706-88 du CPP français) N.B : Que ce soit au Maroc ou en France, toutes les prolongations de la durée initiale de garde à vue sont subordonnées à une autorisation écrite et motivée du procureur, après présentation du gardé à vue.

Les droits du gardé à vue :

Au Maroc : Les droits du gardé à vue ne sont pas assez élargis que dans les phases judiciaires ultérieures. Le suspect à ce stade a le droit de d’informer l’un de ses proches et de s’entretenir avec un avocat pour une durée de 30 minutes à l’expiration de la moitié de la durée initiale de sa GAV. (Article 66 du CPC marocain).

En France : Le gardé à vue bénéficie de plusieurs droits. Ceux-ci lui sont notifiés dès son placement en GAV : il a le droit d’avertir l’un de ses proches ainsi que son employeur, le cas échéant. Il peut demander un examen médical pour s’assurer de la compatibilité de son état de santé avec le placement en GAV. Le suspect a le droit de s’entretenir avec son avocat pour une durée de 30 minutes, avant tout interrogatoire au fond. Son avocat peut l’assister durant l’interrogatoire et présenter éventuellement des observations écrites. Si le suspect est étranger, il peut être assisté d’un interprète et avertir la représentation consulaire de son pays.

  • b. L’enquête préliminaire :

Les règles encadrant l’enquête préliminaire sont les mêmes dans les deux textes nationaux, notamment en matière de perquisition qui est
subordonnée au consentement de l’intéressé. La garde à vue dans le cadre de l’enquête préliminaire obéit aux mêmes règles que celles prévues pour l’enquête de flagrance.

2. Les règles en matières d’instruction :

Les prérogatives du juge d’instruction :
Au Maroc : Le juge d’instruction peut décider un placement en détention préventive. Il peut déléguer aux officiers de police judiciaire des pouvoirs d’instruction par le biais d’une commission rogatoire.

En France : Le juge d’instruction n’a pas le pouvoir de placer le mis en examen en détention provisoire. Le juge d’instruction adresse un avis au Juge des libertés et de la détention (JLD) qui a exclusivement le pouvoir de décerner un mandat de dépôt. En revanche, le juge d’instruction peut mettre fin à la détention provisoire et décider des mesures de contrôle judiciaire. Le juge d’instruction peut déléguer l’accomplissement de mesures d’investigation aux officiers de police judiciaire par le biais d’une commission rogatoire.

3. Les règles en matière de jugement :

  • a. Les règles de compétence matérielle :

Au Maroc : Les contraventions et les délits sont jugés par le Tribunal de première instance.
Les crimes (à partir de 5 ans de réclusion criminelle jusqu’à la peine de mort) sont jugés par les chambres criminelles près les Cours d’appel
(chambre criminelle de première instance composée de trois magistrats et chambte criminelle d’appel composée de cinq magistrats).

En France : Les contraventions sont jugées par les tribunaux de police et les délits sont jugés par le tribunal correctionnel. Les crimes (à partir de 15 ans de réclusion criminelle) sont jugés, selon les cas, soit par les Cours criminelles départementales (uniquement en première instance), soit par les Cours d’assises (en première instance et
en appel : composées respectivement de 6 jurés et 3 juges professionnels, et 9 jurés et 3 jugés professionnels).

  • b. Les règles en matière de prescription :

Maroc : L’action publique en matière de contraventions se prescrit par un délai d’un an ; En matière délictuelle, elle se prescrit par un délai de 4 ans ; en matière criminelle, le délai est de 15 ans. La prescription court à compter de la commission de l’infraction. Pour certaines infractions commises à l’encontre des mineurs, le délai court à partir de la majorité de la victime. En France : S’agissant des contraventions, la prescription de l’action publique est d’un an. En matière correctionnelle, la prescription est de 6 ans. Pour les crimes, la prescription est de 20 ans. En matière de terrorisme, la prescription est de 30 ans. Les crimes contre l’humanité sont imprescriptibles. La prescription de l’action publique court à compter de la commission de l’infraction. Pour certaines infractions commises à l’encontre des mineurs, le délai court à compter de la majorité de la victime. S’agissant des infractions dites occultes ou dissimulées, le délai de prescription court à compter de la découverte de l’infraction (Article 9-1 du CPP français).

4. Les règles en matières de voies de recours :

  • a. Les voies de recours en phase d’instruction :

Au Maroc : Les ordonnances du juge d’instruction sont susceptibles de recours devant la chambre dite correctionnelle près la Cour d’appel, notamment les ordonnances de placement en détention préventive, les ordonnances de renvoi, celles de non-lieu, etc…

En France : Les ordonnances du juge d’instruction ainsi que celles du JLD sont susceptibles de recours devant la chambre d’instruction près la Cour d’appel, notamment les ordonnances de renvoi, les ordonnances de mise en accusation, celles ordonnant des mesures de contrôle judiciaire, etc… Le CPP français prévoit comme recours en matière de détention, des référés-libertés.

  • b. Les voies de recours en phase de jugement :

Au Maroc : La voie d’appel s’exerce dans un délai de 10 jours à compter du prononcé du jugement de première instance ; Le pourvoi en cassation s’exerce dans un délai de 10 jours à compter du prononcé de la décision d’appel. Si le prévenu ou l’accusé comparaît librement, les voies de recours ordinaires précitées sont suspensives de la condamnation à la peine
privative de liberté. Toutefois, à titre exceptionnel, un mandat de dépôt peut être décerné à l’issue de l’audience par le tribunal ou la cour qui a rendu la décision de condamnation.

En France : L’appel peut être interjeté dans un délai de 10 jours à compter du prononcé du jugement de première instance ; Le pourvoi en cassation peut être formé dans un délai de 5 jours à compter du prononcé de l’arrêt d’appel. En cas de comparution libre en matière correctionnelle , lesdites voies de recours sont suspensives, sauf décision exceptionnelle de placement en détention à l’issue de l’audience. En matière criminelle, l’arrêt d’assises vaut titre de détention. L’accusé appelant peut introduire une demande de mise en liberté

voir plus sur :

PROCÉDURE PÉNALE : COMPARAISON ENTRE LE MAROC ET LA FRANCE

Laisser un commentaire